Date de sortie du numéro 14 de Bananas : 11 février. Disponible dans une poignée de très bonnes librairies spécialisées (diffusion Makassar) et dans la boutique de ce site pour ceux qui habiteraient près de magasins ne s’intéressant pas à la mémoire de la bande dessinée.

Le n°15, en préparation, est déjà bien avancé, ce qui est une bonne chose car cela m’oblige à continuer, ne serait-ce qu’à cause des collaborations déjà sollicitées.

En ce moment, je suis un peu épuisé à cause des exigences administratives de ma banque (La Banque Postale pour ne pas la nommer) dont la liste des documents administratifs à lui fournir est presque aussi inflationniste que ses frais de tenue du compte, et d’une nécessité douteuse. (Pourquoi, par exemple, me demander un spécimen de facture de fournisseur pour justifier d’une adresse postale qu’elle connaît puisque c’est celle à laquelle me sont envoyés depuis 28 ans mes relevés de compte ?)

Par ailleurs, si l’on s’amuse à faire une comparaison avec le taux d’inflation général et ceux de ses tarifs pour les associations, le résultat est impressionnant : respectivement + 21 % et + 2.730 % entre 2006 et 2021. Vu qu’à l’origine, les frais de tenue de compte étaient quasi-nuls, la comparaison portant sur des montants en valeur absolue relativement faibles n’a évidemment qu’un intérêt limité. Mais au fil du temps, la comparaison acquiert plus de sens et devient accablante : +17,6 % d’augmentation, rien qu’au cours de la seule année 2021. Et il faut s’attendre à une nouvelle augmentation significative pour 2022.

Ajoutée à l’augmentation de l’affranchissement du courrier (non répercutée dans la boutique de ce site pour cause de mauvaise maîtrise de ce dernier), il faut vraiment être motivé pour continuer…

(Je ne vous parle pas de l’augmentation du prix du papier, car je suppose que vous êtes déjà en larme.)

Après 13 mois d’absence pour cause d’hospitalisation de son directeur de publication et rédacteur en chef, Louis Cance, HOP ! la revue trimestrielle « d’informations et d’études sur la BD », publie son numéro 166, daté « 3e et 4e trimestres 2020 » pour des raisons administratives. À l’évidence, la fabrication du numéro a été réalisée au premier semestre 2021, ce qui fait que les informations brèves et notes de lectures d’albums sont largement défraîchies. Heureusement, ces pages ne représentent qu’une infime partie du sommaire. En outre, les 4 pages d’ « actualité des collectionneurs » portant pour l’essentiel sur des productions à faible tirage et à médiatisation très limitée conservent leur intérêt.

Ce sont les articles nécrologiques qui occupent la plus grande place (27 pages sur 64). Certes, elles sont bien plus denses, précises et exactes que ce que l’on peut lire ailleurs, avec l’avantage de ne pas se limiter aux auteurs les plus connus, mais elles réduisent fortement l’espace réservé aux dossiers. Il est par exemple regrettable que les mémoires de Guy Mouminoux (l’auteur de Rififi, Prémolaire et du Goulag), décédé en janvier, se soient interrompues faute de place, en dépit du fait que les ressassements généraux soient plus nombreux que les informations .

Les deux pages qui ouvrent le dossier René Follet ne se distinguent pas des autres articles nécrologiques. Elles résument bien la riche carrière de ce grand dessinateur très admiré de ses pairs (du moins ceux de sa génération) mais dont la notoriété auprès du public est faible, sans rapport avec son talent. Et pas seulement parce qu’en dehors de ses travaux d’illustration il collabora, anonymement ou non, aux productions de ses collègues (Mitacq, Vance, etc.) : aucune de ses propres séries publiées dans les journaux français, belges ou hollandais ne furent des succès (Les Zingari, Ivan Zourine, Steve Severin, Edmund Bell, Ikar, etc.). Beaucoup ne sont d’ailleurs plus disponibles mais il est encore possible de se procurer l’édition 2009 parue au Lombard de Terreur (scénario André-Paul Duchâteau), Stevenson le pirate intérieur (scénario Rodolphe, Dupuis éditeur) et sa reprise de Jean Valhardi (intégrale volume 6 ; scénario André-Paul Duchâteau et Jacques Stoquart, Dupuis éditeur). En revanche, S.O.S. Bagarreur (scénario Maurice Tillieux), dont la dernière édition remonte à 2018 aux éditions de l’Élan, est épuisé.

Follet et Tillieux – S.O.S. Bagarreur – Spirou n°1562 du 21/03/1968

L’autre dossier de ce numéro est une présentation et bibliographie française d’une série américaine, oubliée en France car éditée seulement dans les années 1960 et 1970 dans diverses publications des éditions Edi-Europe et Impéria : Jeff Cobb.

 Hop ! 56 boulevard Lintilhac, 15000 Aurillac. Règlement par chèque à l’ordre de  AEMEGBD, au prix de 10 euros + 4 euros de port.

Gébé – Berck – Hara-Kiri n°111 – décembre 1970

L’émission « Toute une vie » du samedi 29 janvier (disponible en podcast sur France-Culture) était consacrée à Gébé. Elle m’a donné l’envie de me replonger dans ses bandes dessinées. J’ai donc ressorti quelques numéros d’Hara-Kiri et de Charlie-Hebdo. J’avoue avoir été déçu. Sans doute parce que l’importance historique de ces journaux sur le plan culturel n’a fait que croître dans les mémoires, alors que le contenu, lui, n’a pas bougé, et a même souffert du passage du temps. Un gouffre s’est ouvert entre les œuvres et la légende. Heureusement, je suis tombé sur deux pages de Berck, un personnage évoqué dans l’émission, dont sont extraites les deux cases en illustration. Peut-être que Gébé ne restera à la postérité que comme l’initiateur d’une utopie nommée L’An 01 qui est plus qu’un livre et plus qu’un film ? Ce ne serait déjà pas si mal.

(La version considérée à raison comme définitive de L’An 01 a été publiée par L’Association.)

www.franceculture.fr/emissions/toute-une-vie/gebe-1929-2004-un-dessinateur-visionnaire

Pierre Wininger (1950 – 2013) est un curieux dessinateur qui aura été inspiré à ses débuts par Tardi, Jacobs et, surtout, Jean-Claude Forest. Mais pas le dessinateur des grands romans publiés par Casterman, ni même de l’inoubliable Hypocrite, celui du personnage de Charlot dans les publications pour la jeunesse des années 1950. Après avoir republié les 3 premiers épisodes des aventures de Victor Billetdoux parus dans la seconde partie des années 1970 chez Glénat. Les Aventuriers de l’Étrange ont édité fin novembre le tapuscrit du scénario du 4e épisode agrémenté de quelques rares pages dessinées, sous le titre : Les Voleurs de Lune. De nombreux autres documents concernant la série (dont deux entretiens avec son auteur jadis parus dans Schtroumpf fanzine et PLGPPUR)figurent dans cet album cartonné.

www.les-aventuriers-de-letrange.fr

Il est heureux que de petits éditeurs se passionnent encore pour des auteurs ayant disparu des radars. C’est d’autant plus méritoire que même les dessinateurs reconnus comme faisant partie des plus grands ne sont plus toujours édités. Voir la table ronde SoBD retranscrite dans Bananas n°13. C’est dire l’ahurissant désintérêt que suscite le patrimoine de la bande dessinée.

Dans ses mémoires parues l’année dernière (Une vie dans les cases, PLG), Thierry Groensteen écrivait que lorsqu’il citait des œuvres classiques à ses étudiants, il ne voyait « généralement se lever que deux ou trois mains sur les quinze ou vingt étudiants présents ». De manière plus explicite encore, je l’entendais il y a peu raconter que, pour ses étudiants, un livre paru il y a 5 ou 10 ans, c’était déjà du patrimoine. Le Festival d’Angoulême n’est pas si loin de cette accablante vision, ce qui est autrement plus grave et beaucoup moins excusable, quand il retient, pour sa sélection du Prix du Patrimoine 2022, des titres – par ailleurs de qualité, là n’est pas le sujet – qui ne sont que de simples nouvelles éditions de livres relativement récents (Stuck Rubber Baby d’Howard Cruse et Jérôme d’Alphagraph de Nylso). Mais peut-être que ce serait faire preuve d’un trop grand mépris envers la création contemporaine que de l’exclure de ce prix ? (Je retiens comme hypothèse que le « contemporain » ne se résume pas aux quelques semaines pendant lesquelles un livre tout juste diffusé demeure sur les tables des libraires.)

Finalement, c’est sûrement mieux, et plus progressiste, que de mettre en lumière BDArtist(e), label de la Galerie Barbier, qui est parvenu à achever l’année dernière la publication en français de l’intégrale d’une vieillerie sexiste, raciste et colonialiste comme Terry et les Pirates. (oui oui, c’est bien du second degré.)

Dernière chose : des exemplaires du fanzine Bizu contenant un entretien avec le créateur de La Jungle en Folie qui fit les beaux jours de Pif Gadget sont disponibles dans la boutique de ce site.