Emmanuel Guibert, Grand Prix de la ville d’Angoulême en 2020, aura droit, comme c’est la tradition, à son exposition lors de l’édition suivante du Festival International de la Bande Dessinée. Il aurait été logique que soient présentées les œuvres qui ont fait sa réputation (sa trilogie mêlant dessins et photos : Le Photographe ; les livres sur son ami américain Alan Cope ; sa bande dessinée jeunesse Ariol, etc). Sauf que tout cela déjà été présenté à Angoulême même, en 2018, pour saluer son attribution du Prix René Goscinny 2017, juste reconnaissance de ses talents de scénariste.
L’exposition de 2021 ne pouvait en aucun cas faire doublon avec la précédente. C’est la raison pour laquelle, elle sera constituée, pour l’essentiel, d’œuvres jamais montrées : « Pas de bande dessinée ici » nous fait savoir le dossier de presse, « mais des peintures de tous formats, des estampes, des dessins et des carnets de croquis ; des travaux de plein air, sur le motif, pour une visite aux airs de promenade campagnarde. »
Dans un second espace, Emmanuel Guibert a choisi d’exposer des œuvres d’amis : croquis, estampes, photographies, sculptures, toiles, gravures sur bois, diaporamas, cartes postales, soit à peu près tout… sauf des bandes dessinées, si j’ai bien compris, ce qui est un peu curieux.
Cette variété est à l’image de la production de bande dessinée d’Emmanuel Guibert qui n’est jamais resté prisonnier d’un genre, d’une thématique, et même d’un style graphique et qui aura réussi à toujours séduire ses lecteurs. Mon seul mauvais souvenir concerne Les Olives Noires, une série scénarisée par Joann Sfar, interrompue au troisième volume. Je garde en tête (à tort?) que l’histoire avait été tronçonnée toutes les 44 ou 46 planches de manière à rentrer dans des albums cartonnés couleur standard et que l’ultime livre s’interrompait au milieu d’une séquence. J’ignore à qui incombe la faute (scénariste ou dessinateur ; je doute que ce soit du fait de l’éditeur) mais cela m’a toujours paru un manque de respect flagrant envers les lecteurs. Ces olives me sont donc restées en travers de la gorge mais n’ont jamais influencé mon jugement sur les livres suivants de ces deux auteurs : si je trouve que certains de Sfar sont calamiteux (par exemple Tu n’as rien à craindre de moi, paru chez Rue de Sèvres en 2016), mais son avant-dernier Chat du Rabbin est très bien, j’ai apprécié tous ceux de Guibert, sans exception.
L’exposition ouvre le 30 janvier (coïncidant avec le premier week-end du 48e Festival d’Angoulême) et se clôturera le 27 juin (soit le dernier jour du dit-Festival). Pour ceux qui l’ignoreraient, cette édition très particulière pour cause de Covid-19 se tiendra en deux temps, de manière symbolique et plus que limitée du 29 au 30 janvier, et de manière plus développée, du 24 au 27 juin, faisant de fait une malencontreuse concurrence à d’autres festivals.
Dans l’attente, on peut se reporter au dernier livre d’Emmanuel Guibert paru chez le label Aire Libre de Dupuis il y a quelques mois, Légendes 1 – Dessiner dans les musées et autres lieux de culte, qui compile des croquis et dessins réalisés depuis une trentaine d’années, abondamment légendés comme pour faire écho au titre. Certains ont été réalisés après consultation d’originaux (De Vinci, Degas, Raphaël,etc.) « J’ai pu les copier, pas les toucher. Il ne faut pas trop exiger du Paradis » écrit-il.
Le report à fin juin du Festival d’Angoulême a généré le mécontentement de Mathieu Diez, directeur de Lyon BD, et de Pascal Mériaux, directeur des Rendez-Vous de la Bande Dessinée d’Amiens, qui en appelaient à une intervention des pouvoirs publics. Dans une tribune rendue publique, ils écrivaient notamment : « Cette reprogrammation vient bouleverser le calendrier annuel des manifestations autour de la bande dessinée. Elle aura pour conséquence immédiate de fragiliser les festivals de bande dessinée se tenant habituellement à cette période et avec eux le soutien qu’ils apportent depuis longtemps aux artistes du neuvième art. Le cumul de plusieurs rendez-vous dans une « poche » de dates allant de la fin mai à la fin juin va enfin drastiquement limiter l’exposition médiatique dont la bande dessinée et ses artistes bénéficiaient à l’occasion de rendez-vous répartis au long de l’année. Alors qu’ils participaient à la plupart des grands rendez-vous de l’année, les professionnels du secteur indiquent qu’ils devront désormais faire des choix. »
Pour sa part, le SoBD ex-2020, dont ce sera la 10e édition, a fait un report dans le temps plus rapproché donc plus risqué (comprendre : plus hypothétique), passant de début décembre 2020 à début février (du 5 au 7).
Le Prix Tournesol, décerné chaque année fin janvier durant le Festival d’Angoulême à un album défendant les valeurs de l’écologie politique, lui, ne sera pas décalé dans le temps. Mais l’apéro offert à cette occasion, le vendredi 29 janvier 2020, à 18 h 30 au café Le Point carré, suffira-t-il à attirer les foules ?
Hop ! n°165 propose un dossier Albert Uderzo (article de F. Saint-Martin suivi d’une bibliographie hors Pilote) et la suite des dossiers Jean Cézard (période 34 Caméra, 1949 / 1954), Pierre Brochard (bibliographie hors éditions de Fleurus) et Scorchy Smith (1954 / 1959). Plus 25 pages de nécrologies et l’actualité des collectionneurs. La revue reprend également un texte mis en ligne sur le site bdzoom le 3 novembre dernier, signé Dominique Petifaux, sur Claude Guillot, mort le 30 octobre dernier, responsable d’un des meilleurs supports consacré au 9e art : Le Collectionneur de Bandes Dessinées (1977 / 2008). Le prochain numéro de Hop ! sera probablement consacré à René Follet, mort le 13 mars dernier.
Hop ! 56 boulevard Lintilhac, 15000 Aurillac. Règlement par chèque ou mandat (à l’ordre de AEMEGBD) au prix de 8,00 euros + 3,80 euros de port.
René Follet, dessinateur très admiré de ses pairs, mais peu connu du grand public faute d’être associé à une série à succès, est présent le temps d’un dessin et d’une brève lettre dans le n° 8 des Archives du Père Jeff. Parmi les quelques trésors reproduits dans cette publication toujours hors commerce, une planche de Gil Jourdan de 1961, acquise en 1983 pour 800 francs. Heureuse époque ! Par comparaison, une planche de la même série était vendue par Heritage Auctions le 3 octobre dernier au prix de 30.000 dollars !
L’une des trois revues dirigées par Frédéric Bosser, Les Arts dessinés, qui se consacre au dessin sous toutes ses formes, lance une campagne d’abonnement jusqu’à la mi-janvier sur KissKissBankBank pour augmenter son lectorat en ces temps calamiteux. Bananas serait bien inspiré d’en faire autant…
L’excellente revue italienne cinquantenaire Fumetto publie dans son n°116 un entretien avec Harry Morgan initialement réalisé par Thierry Lemaire pour son site Cases d’Histoire. Il y clame son amour pour la bande dessinée des années 1920 qui constitue pour lui « une source continuelle d’émerveillement, alors que cette décennie semble curieusement négligée par les historiens français. »