Goscinny a eut droit, pour le 40e anniversaire de sa mort à plusieurs expositions. Celle du musée d’art et d’histoire du judaïsme, « René Goscinny – Au-delà du rire », se tient du 27/092017 au 04/03/2018. Celle de la Cinémathèque française, « Goscinny et le cinéma. Astérix, Lucky Luke & Cie », débute quelques jours plus tard pour se terminer à la même date.
Elles se complètent assez bien, avec des centres d’intérêts divergeants.
L’exposition de la Cinémathèque est naturellement entièrement centrée sur le cinéma. Fort bien conçue, ce qui n’est pas une surprise puisque Jean-Pierre Mercier, co-responsable de l’exposition Morris à Angoulême en 2016, en a assuré le commissariat général, elle s’accompagne d’une programmation de films assez variés.
Si le Goscinny réalisateur de 4 longs métrages d’animation et scénariste (Le Viager, de Pierre Tchernia) ne déchaîne pas d’enthousiasme débridé de ma part, il est pourtant certain que le cinéma joua un rôle essentiel dans son œuvre. Comme l’écrit très bien Frédéric Bonnaud, l’actuel patron du lieu, l’exposition « montre comment cette familiarité et ce désir profond de cinéma innervent la totalité de l’œuvre du plus grand des scénaristes de bande dessinée ». Tant Lucky Luke qu’Astérix regorgent de clins d’œil à des films ou à des acteurs. La projection de westerns, illustrés dans le programme par les couvertures d’albums de Lucky Luke qui s’y rattachent, est particulièrement judicieuse. Je me rappelle d’ailleurs du choc produit à la vision de Le Cavalier du désert (William Wyler, 1940), découvert il y a une trentaine d’années… à la Cinémathèque Française, comme évidente matrice de « Le Juge » et plus généralement de la série Lucky Luke.
Pour saluer l’album « Astérix et Cléopâtre », premier grand succès de la série, de multiples films autour de la célèbre reine d’Egypte sont proposés : celui de Joseph Mankiewicz, explicitement parodié dans la bande dessinée, dont on sous-estime largement les qualités artistiques car il est bien autre chose qu’une matière ridicule dont l’utilité principale se résumerait à inspirer des humoristes, plus d’autres films de série B, parfois très rares… et très calamiteux. Ce fut le cas notamment de « Toto et Cléopâtre » (voir photo) : même le projecteur eut du mal à supporter ce qu’il y avait sur la pellicule, d’où cinq ou six interruptions en cours de projection, faussement attribuées à la mauvaise qualité de la copie.
Habilement, l’exposition mixe des espaces ludiques (la reconstitution de la salle de classe du Petit Nicolas), d’autres plus conformes aux habitudes du lieu (la salle consacrée à Cléopâtre, avec quelques costumes issus de différents films). Astérix et Lucky Luke sont évidemment bien représentés, ainsi que les studios Idéfix. Quelques originaux assez rares valent le coup d’œil ainsi qu’une intelligente mise en perspective de plusieurs scènes de films concernant Cléopâtre.
L’exposition du MAHJ est beaucoup plus large et commence par l’histoire familiale de ce descendant d’émigrés juifs originaires de Pologne et d’Ukraine. Il est toutefois précisé, dès le début du parcours, que la judéité de Goscinny n’a guère eut d’influence dans son œuvre. En revanche, savoir d’où venait historiquement et géographiquement René Goscinny, peut aider à dépasser cette idée idiote d’une soi-disant franchouillardise d’Astérix.
Malgré des espaces parfois réduits qui limitent les possibilités en matière de scénographie, le Musée est parvenu à construire une très belle exposition, assez complète, riche en documents rares. De très nombreuses planches originales sont exposées, y compris quelques-unes de Jijé concernant un épisode écrit par Goscinny, à mon avis sans éclat. On peut également voir quelques planches d’Iznogood particulièrement bien choisies. Il faut notamment féliciter la personne qui eut l’idée de mettre en vis à vis une ancienne planche de la série avec une beaucoup plus récente. La métamorphose du style graphique de Jean Tabary est saisissante et l’on découvre à quel point, et avec quel bénéfice, son trait s’est uderzoisé.
A la multiplicité des objets exposés au MAHJ (planches, dessins, journaux, photos, scénarii, etc.), il faut noter la présence d’un film d’animation de monsieur Marchouillard (voir photo de l’artiste lors du vernissage): « René Goscinny, l’irréductible », réalisé à cette occasion. Il n’est pas impossible – mais pas certain non plus – que ce modeleur de talent fasse une très brève apparition en février dans le prochain Bananas. Dans l’attente, je renvoie à ses autres films visibles sur son site de la Cinémamecque :
Il sera encore question d’Astérix au prochain festival BD de Saint-Malo les 27,28 et 29 octobre puisqu’une exposition permettra à divers dessinateurs de livrer le regard qu’ils portent sur le célèbre gaulois. Egalement prévus : Jean-Louis Pesch (Sylvain et Sylvette), Lauzier (« Tranches de vie ») à l’humour dévastateur et qui eut le tort d’être politiquement très incorrect avant l’heure, et l’attachant Olivier Josso (« Au Travail ») qui viendra par ailleurs dialoguer avec le public le samedi 28.
Le 4e Salon BD LGBT se tiendra le samedi 4 novembre de 10 H à 18H à la mairie du 4e arrondissement, 2 place Baudoyer. Une vingtaine de dessinateurs et illustrateurs sont attendus.
Le premier week-end de décembre se tiendra à Paris le SoBD, toujours consacré aux livres et revues sur la bande dessinée. Les invités d’honneur sont Philippe Sohet et Edmond Baudoin qui s’était déjà invité l’année dernière, lors de la précédente édition, à la rencontre consacrée à la légende de Futuropolis. On en trouvera d’ailleurs la retranscription dans le prochain Bananas.
Et si vous n’aimez pas sortir de chez vous, vous pouvez toujours vous rabattre sur la lecture du dernier HOP ! consacré à Jidéhem, créateur de Starter et de Sophie dans Spirou. Il travailla également avec Franquin, notamment sur Gaston Lagaffe, ce qui n’est pas sans importance quand on sait que son vrai nom était Jean de Mesmaeker.
Au sommaire de ce numéro 154, suite de l’entretien et de la bibliographie de Jean Ollivier, un des piliers scénaristiques de Pif / Vaillant.
Et toujours les notices nécrologiques très fournies dont l’une consacrée à Martin Landau qui, avant de jouer dans la superproduction « Cléopâtre » et la série « Mission Impossible », avait fait ses débuts devant une table à dessin.
Hop ! 56 boulevard Lintilhac, 15000 Aurillac. Règlement par chèque ou mandat (à l’ordre de AEMEGBD) au prix de 8,00 euros + 2,85 euros de port.
Parmi les parutions récentes, Cornélius a sorti le deuxième volume de Pepito du grand Luciano Bottaro. Pas moins de 12 histoires et une préface inhabituellement grave et sérieuse de la part d’un éditeur plutôt connu pour son humour dévastateur (mais assurément réjouissant).