La sélection 2018 des livres parus dans l’année et concourant pour le Prix des lecteurs Ouest-France / Quai des bulles est fort instructive.

Certes, elle ne compte aucun manga (environ 40 % de la production) ni aucun titre appartenant à une série (catégorie toujours en tête des ventes si j’en crois 8 des 10 titres les plus vendus par les librairies Canal BD en juillet et en août). C’est dire si ce panel n’est en rien représentatif de la production mais je ne vois pas par quel miracle 10 livres prétendants à ce Prix pourraient être en capacité de donner une bonne vision de ce que sont les 4.990 autres parus la même année.

L’intérêt de cette sélection dont le gagnant sera dévoilé pendant le Festival Quai des Bulles qui se tient les 12,13 et 14 octobre à Saint-Malo est d’être « un Prix du public », ce qui suppose qu’il doit potentiellement pouvoir intéresser un lectorat assez large. Au vu de la sélection, que je vous laisse découvrir sur le site du Festival (www.quaidesbulles.com ; vous aurez du même coup le programme des expos, rencontres et autres réjouissances), il me semble que le choix est assez varié et les livres pas nécessairement hyper-formatés même si Glénat aligne 2 titres et que les éditeurs alternatifs sont peu représentés (mais ces derniers n’ont pas le monopole de la qualité). C’est donc plutôt réjouissant de penser que de (probables) bons livres pourront toucher un public assez large, nullement condamné à se suffire des best-sellers habituels type Blake et Mortimer. (A ce propos, on peut se passer de lire La Vallée des immortels, qui sort le 16 novembre.)

Si ce sont plutôt de jeunes auteurs qui sont mis en avant, n’allez pas bouder tous les vieux pour autant. Si je n’avais qu’un seul conseil de lecture à vous donner, ce serait de lire Mode O’Day, de Robert Crumb, un portrait peu reluisant de l’Amérique de Ronald Reagan. Les commentaires ne manqueront pas sur l’aspect de critique sociale du livre mais on peut aussi l’aimer sur un plan purement graphique. La splendide couverture de la nouvelle édition chez Cornelius donne le ton. On peut aussi apprécier la préface de Jean-Pierre Mercier, crumbien invétéré depuis toujours, et les strips de Roberta Smith dont les dessins rappellent ceux des premières pages de Fritz the Cat, pour ne citer que deux ajouts à la première édition parue fin 1990 ou début 1991 chez Albin-Michel sous le titre Belle d’un jour.